Lors d’un voyage en Amérique Latine, vous entendrez surement parler quéchua. A moins de rester seulement dans les grandes villes!
Une langue qui fait partie de l’identité indienne
Le quechua est la langue indigène la plus répandue sur le continent américain avec près de 10 millions de locuteurs. Elle est l’une des langues officielles du Pérou, pays où le quechua est le plus répandu, mais est également parlée dans toute la région andine, du sud de la Colombie au nord de l’Argentine, en Bolivie et en Equateur.
Cette langue comprend une multitude de dialectes, répartis en deux groupes : le chinchay méridional (où l’on trouve le cuzqueno-bolivien, le quechua d’Ayacucho et celui du Nord Argentine) et le waywash ou Quechua I, parlés dans les régions du centre du Pérou.
Le terme de « quechua » signifie « zone tempérée », utilisé pour désigner la région où cette langue était parlée, et par extension, la langue elle-même. Les études linguistiques font remonter son origine, et son expansion à la période Chavín (1800 av. J.-C. – 400-200 av. J.-C.) ; elle servit progressivement de langue de communication aux différentes populations andines, devenant langue impériale inca sous le règne de Pachacutec (1438-1471).
Jusqu’à la conquête espagnole, elle reste uniquement orale, utilisant ensuite l’alphabet espagnol pour passer sous une forme écrite. Les premiers manuels de grammaire et dictionnaire de quechua sont rédigés par un Dominicain, Frère Domingo de Santo Tomás, en 1560.
La langue quechua actuelle compte 3 voyelles : a, i et u (prononcé « ou »), et 3 variantes de prononciation pour chaque consonne.
Syntaxiquement parlant, le quechua est une langue agglutinante, c’est-à-dire que différents suffixes ajoutés à la fin des mots permettent d’en préciser le sens et le contexte. Le verbe est rejeté à la fin de la phrase, et les temps y sont très peu marqués : par exemple, dans un récit au passé, seul le premier verbe en portera la marque, et indiquera le temps des verbes suivants.
La notion de genre masculin ou féminin n’existe pas, celle de nombre (singulier ou pluriel) est beaucoup moins utilisée que dans les langues indo-européennes.
En revanche, le quechua précise davantage certaines situations : il existe ainsi deux pronoms « nous », selon que l’interlocuteur fait ou non parti de l’action ; on emploie un temps spécifique pour désigner une action que la personne a vécu dans un état d’inconscience (ivresse ou rêve, par exemple) ; ou bien des suffixes particuliers pour désigner l’espace dans lequel a eu lieu un événement, si on franchissait une limite vers l’intérieur ou vers l’extérieur.
En raison de sa longue cohabitation avec l’espagnol, la plupart des locuteurs du quechua étant également hispanophones, on retrouve de nombreux termes quechua en espagnol, et en catalan, certains d’entre eux passés également au français : coca (kuka), gaucho (de wakcha, pauvre), quinine (quinina en espagnal, kikina en quechua), lama, puma, condor, guano, quinoa, etc.
Actuellement, différents pays d’Amérique du Sud ont développé des programmes de protection des langues amérindiennes. La création de l’Academia Mayor de la Lengua Quechua (Grande académie de la langue quechua) en 1990 à Cuzco (Pérou) va dans ce sens : cet organisme public a pour objectifs de veiller à la pérennité de la langue quechua et à son expansion, de mettre en place des normes grammaticales et un dictionnaire normatif du quechua, et de promouvoir son enseignement, son apprentissage et les recherches linguistiques qui l’étudient.
Cependant, malgré ce type d’initiative, le quechua reste peu enseigné officiellement, même dans un pays comme le Pérou, où il est la langue la plus pratiquée après l’espagnol, posant la question à long terme de sa transmission et de sa pérennité.
Espérons que le quechua résistera longtemps encore!
Et vous, connaissiez-vous cette langue? L’avez-vous déjà entendu parler?