Si, en Europe, certaines des luttes de peuples amérindiens ont été largement médiatisées ces dernières années, du Chiapas à l’Amazonie, celle des Mapuches passe largement inaperçue. Pourtant l’histoire de ce peuple n’est pas moins riche que celle d’autres populations d’Amérique Latine.
Un peuple de la Patagonie
Les Mapuches, dont le nom signifie « peuple de la terre », sont également appelés Araucans. Ils vivent principalement au Chili, dans la région de Temico, et autour de Santiago, et dans le Centre – Est de l’Argentine, en Patagonie. Ils représentent une population d’environ 600 000 personnes au Chili (soit 4% des habitants du pays), 200 000 en Argentine – dans ces deux pays, seulement un tiers de ces Indiens vit aujourd’hui en milieu rural.
Leur origine se situe vraisemblablement dans les Andes chiliennes. Leur tradition orale rapporte qu’ils furent l’un des seuls peuples à résister à l’expansion de l’empire Inca, qui ne réussit pas à les conquérir.
Au XVIe siècle, les Espagnols n’y réussirent pas mieux : ne parvenant pas à les vaincre militairement, ils signent un traité en 1641 qui garantit aux Mapuches tout le territoire situé au Sud de la rivière Biobio au Chili.
Les premiers massacres de Mapuches
Au début du XIXe siècle, l’indépendance du Chili et de l’Argentine déclenchent les premiers massacres de population mapuche, qui vivait alors sur une étendue proche de la surface du Portugal.
Chacun des deux pays, en effet, a des intérêts stratégiques à conquérir ces territoires : l’Argentine pour accéder au Pacifique, le Chili pour prendre le contrôle de la Terre de Feu, et se ménager ainsi un accès sur l’Atlantique. Pendant ces conflits, les Mapuches passent de 1 800 000 à 300 000 personnes, et se retrouvent parqués dans des réserves sur à peine 5% de leur territoire.
Tout au long du XXe siècle, ces persécutions continuent, que ce soit sous la dictature de Pinochet, ou après la transition démocratique de 1989, malgré une brève accalmie sous la présidence de Salvador Allende.
La culture Mapuche
La culture mapuche, de tradition agraire, basée sur la transmission orale et sur une religion centrée sur le culte de la terre et des ancêtres, peine à continuer d’exister. La structure polygame des familles mapuches traditionnelles, mais surtout leur conception communautaire de la gestion des terres agricoles sont autant de traditions qui se heurtent à la logique économique des grands propriétaires fonciers.
Le développement du tourisme, mais surtout l’exploitation forestière, la construction de centrales hydroélectriques représentent des menaces importantes pour l’équilibre et les ressources des territoires mapuches.
À partir de 1992, l’Etat chilien, par le biais de la « loi indigène », reconnait la dette du Chili à l’égard de la population mapuche ; mais cela ne débouche pas ni sur des mesures concrètes de restitution de terres (pourtant prévue dans le texte de loi), ni sur une reconnaissance officielle de ce peuple.
Résistance
Des mouvements de résistance s’organisent pour lutter contre les expropriations, la déforestation, les discriminations économiques et sociales, mais ils sont régulièrement réprimés au nom des lois anti-terroristes. C’est ainsi qu’environ 400 militants mapuches sont emprisonnés au Chili. Ces mouvements s’accompagnent d’un exode massif vers les villes, notamment vers la banlieue de Santiago, vers Concepcion ou Temuco.
En Argentine, l’une de ces actions contre les grands propriétaires terriens a connu un écho particulier en 2003 : elle opposait un couple Mapuche à l’un des principaux propriétaires fonciers argentins, le groupe industriel italien Benetton, qui possède 9% des terres cultivables de Patagonie, essentiellement pour l’élevage de moutons, et donc la production de laine.
Même si l’entreprise de prospection d’aurifère projetée a finalement ouvert, cet épisode a permis une large mobilisation de la communauté mapuche argentine, et a contribué à faire connaitre cette population au-delà du continent sud-américain.
Dernièrement, en janvier 2013, la question de la population mapuche est revenue sur le devant de la scène au Chili : un sommet à Temuco a réuni des centaines de dirigeants mapuches pour réclamer l’arrêt des violences et la reconnaissance de leur peuple. Des négociations ont été entamées avec le gouvernement chilien, dans un contexte de violence accrue après plusieurs attaques contre des propriétaires terriens chiliens.
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